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27/11/2024

Hospitalisation à domicile : quand la digitalisation redéfinit le système de santé 

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La 12 édition de Digital Health Connect, événement de référence qui réunit les acteurs de la santé et du digital, a mis en lumière une transformation majeure pour le système de santé : l’hospitalisation à domicile. Organisée à la Clinique Romande de Réadaptation de Sion, cette conférence a rassemblé 150 participants autour d’experts internationaux et suisses. Du modèle pionnier britannique « Hospital at Home » aux initiatives locales comme patient@home, les intervenants ont démontré comment la technologie et une approche centrée sur le patient peuvent non seulement réduire les coûts, mais aussi améliorer la qualité des soins. Cette avancée promet de révolutionner la culture des soins en Suisse, en rendant le système plus accessible, humain et durable. 

L’hospitalisation à domicile est un concept qui plaît aux patients qui ont pu le tester, en Suisse comme ailleurs en Europe. Selon les études publiées, il générerait moins de coûts et est moins gourmand en infrastructures. C’est donc une réelle opportunité pour repenser le système de santé suisse et le rendre plus accessible et durable. Ces constats ont été posés lors de la douzième édition de Digital Health Connect, qui s’est tenue jeudi dernier à la Clinique romande de réadaptation de Sion. 

Près de 150 participants ont assisté à cet événement organisé par Swiss Digital Health, la Fondation The Ark et la HES-SO Valais/Wallis. Elle a démarré par la présentation de Daniel Lasserson, médecin au Oxford University Hospitals et pionnier du modèle « Hospital at Home » au Royaume-Unis. Ce dernier a expliqué comment il avait soigné et maintenu à domicile plus de 2’000 patients jusqu’ici. A l’aide de la technologie, lui et son équipe sont capables de faire des échographies, des prises de sang, des radiographies et plein d’autres traitements directement au domicile du patient.  

« Nos études l’ont prouvé : prendre en charge les patients chez eux permet de ralentir leur déclin : c’est pourquoi l’hôpital à domicile est efficace en termes de coûts. En moyenne, nous économisons plus de 2’200 livres par patient et par an », a précisé Daniel Lasserson. Selon lui, rien n’oblige à hospitaliser les patients, pour autant qu’ils soient en capacité de décider par eux-mêmes. Il est aussi important d’en discuter avec la famille.  

Des patients davantage impliqués dans les soins

« A domicile, les patients se sentent mieux et davantage en sécurité », a complété Henrik Bjärtun, médecin suédois et fondateur de l’entreprise Medoma. Selon lui, grâce à l’hospitalisation à domicile, les patients sont aussi plus impliqués dans les soins. « Les patients comprennent mieux leur état, tout en dormant et mangeant mieux ». 

Le personnel est également très satisfait des expériences menées en Suède sous la supervision de Medoma. Être au domicile des patients implique un changement d’approche. « Certains soignants doivent enlever leurs chaussures avant d’entrer. Le degré de “pouvoir” est ainsi différent ». L’hospitalisation à domicile peut aussi être une réponse à la pénurie de personnel, en permettant aux réseaux de soins d’être des employeurs plus attrayants. 

Rôle crucial à jouer en Suisse

En Suisse, des projets ont été mis en place dans plusieurs cantons. « Le concept d’hôpital à domicile devrait jouer un rôle crucial dans le système de soins, car il pousse à la transformation du modèle », a précisé Laura Treccani, membre du conseil d’administration de la Swiss Hospital at Home Society. « Il incite à modifier les infrastructures, tout en permettant d’inclure les nouvelles technologies digitales. Les soins et les médecins de premier recours continuent à y jouer un rôle essentiel ». 
 
Reste que pour que l’hospitalisation à domicile fonctionne au mieux, il faut que les différents métiers de la santé puissent collaborer. Mais ce n’est pas encore vraiment la panacée, selon l’étude CollHome réalisée par la HES-SO Valais-Wallis et présentée par Chloé Schorderet. Basée sur les avis de quelque 670 professionnels de santé, elle souligne que les collaborations sont irrégulières et faibles en Suisse romande. « Ces collaborations concernent surtout les échanges d’informations », selon Chloé Schorderet. 

« Nous avons émis plusieurs hypothèses pour expliquer ces faibles collaborations. Parmi elles, les contraintes de temps et le manque de rémunération. Les hiérarchies peuvent également être un frein ». Les résultats de l’étude vont être complétés par des entretiens qualitatifs, afin de valider ces hypothèses.   

Révolutionner la culture des soins

Une table ronde modérée par Laura Treccani a permis de réunir différents acteurs suisses actifs dans des projets d’hôpital à domicile. Chaque participant a pu partager sa vision. Pour Severin Pöchtrager, médecin et responsable de l’hôpital à domicile de Arlesheim (Bâle), l’idée est de garder les gens à la maison. « Ce type de médecine est meilleure et moins chère, et elle peut révolutionner la culture des soins ». 

Selon Euryanthe Sprachta, infirmière au sein du même hôpital d’Arlesheim, les patients doivent pouvoir choisir entre hôpital et maison. « En tant qu’infirmière, il s’agit aussi à terme de trouver du personnel qui aime cette nouvelle approche et souhaite réfléchir différemment. Pour les soins à domicile, les protocoles de l’hôpital sont à adapter, et donc les soignants doivent être flexibles ».  
Claudia Günzel, directrice de Spitex Höfe (canton de Schwytz), rappelle pour sa part qu’il est important que tous les acteurs puissent se parler et mieux communiquer. Kerstin Schlimbach, médecin responsable du réseau schwytzois We4You, espère de son côté que l’hôpital à domicile permettra d’abolir les frontières entre les métiers, en gardant le patient au cœur des processus. « C’est le patient qui doit nous communiquer ses besoins ». 

Enfin, pour Gianni Imbriani, responsable du projet patient@home au Centre hospitalier de Bienne, il faut partager les visions et les expériences. « Nous devons aussi régler rapidement les aspects liés à la facturation et la tarification ». 

Quatre solutions concrètes pour terminer

L’édition 2024 de Digital Health Connect s’est terminée par le pitch de quatre solutions concrètes qui aident au déploiement de l’hôpital à domicile : Domo.health (qui permet le suivi à distance des patients), Médisanté (qui développe une infrastructure IoT médicale connectant divers dispositifs dans un seul cloud), Qumea (qui prévient les chutes et suit la mobilité des patients en toute confidentialité) et Clever.care (une plateforme de communication qui facilite la coordination des soins à domicile). 

De larges plages de networking ont permis aux participants d’échanger, et d’ouvrir la voie à des échanges constructifs. « Avec des conférences de haut vol et des débats intéressants, Digital Health Connect a rempli cette année, comme depuis son lancement il y a 12 ans, sa mission », a conclu Sébastien Mabillard, directeur de Swiss Digital Health et modérateur de la conférence. 

Informations complémentaires : www.digitalhealthconnect.ch